Une délégation d’anciens élèves d’Issoire Tulle (AEIT) à rendu hommage aux AET
morts pour la France dans les combats de la résistance.
A noter la présence du commandant Denis de la 28ème promotion, OSA de l’EMPT de Bourges
qui s’est joint aux membres du CA des AEIT et aux AET anciens d’Issoire présents.
Le samedi 25 mai 2024, l’association des anciens enfants de troupe (AET) commémore le quatre-vingtième anniversaire des combats des enfants de troupe dans la Résistance. L’association honore les morts pour la France et tous les combattants issus des écoles militaires préparatoires engagés dans la Résistance.
Un peu d’histoire ….
Article de l’ingénieur général Alain Baudel dans le numéro 296 de la revue des AET
Nous nous sommes réunis devant notre Mémorial national commémorant le sacrifice des enfants de troupe pendant l’occupation de la France durant la Seconde Guerre mondiale. Ce monument a été érigé sur la commune de Clavières à l’initiative de Jean Galle (Billom 40-44) et du colonel Cajat (Tulle 38-43), avec le soutien de monsieur Albert Hugon, ancien maire de Clavières. Il a été inauguré par le général de corps d’armée Blesbois (Epinal, Autun, La Flèche 3946), notre président général, le 23 juin 1991.
Ont participé à cette cérémonie :
- Une centaine d’anciens enfants de troupe accompagnés de leurs conjoints.
- Le colonel François Maréchal, chef de corps de l’école militaire préparatoire technique de Bourges et sa garde au drapeau.
- La fanfare du lycée militaire d’Autun, aux ordres du major Olivier.
- Un détachement du lycée militaire de Saint-Cyr-l’École aux ordres de l’adjudant Jonathan
- Le colonel Olivier Cortot, commandant le groupement de Gendarmerie du Cantal.
- Le lieutenant-colonel Thierry Perret, délégué militaire départemental du Cantal.
- Monsieur Gilles Bigot, maire de Clavières.
- Madame Bernadette Resche, maire de Chaliers (15320)
Après une présentation des troupes par le commandant Denis, officier supérieur adjoint de l’EMPT de Bourges, au colonel Maréchal, les honneurs sont rendus au drapeau de l’école militaire préparatoire technique de Bourges, remis par le président de la République lors de sa création en 2022. Monsieur Yves Javelaud, vice-président de l’association des AET, procéda à la lecture d’extraits de l’allocution prononcée par le général Blesbois lors de l’inauguration de ce monument.
Le général de division Jean-Paul Martial, président général de l’association des AET, et monsieur Gilles Bigot, maire de Clavières, déposent une gerbe au pied du monument.
Enfin, les honneurs sont rendus au drapeau de l’EMPT, héritier des traditions des EMPT de Tulle et de Le Mans.
Allocution de monsieur Yves Javelaud, vice-président de l’association des AET Extraits de l’allocution prononcée par le général de corps d’armée BLESBOIS, président général de l’association des anciens enfants de troupe (AET), le 23 juin 1991
Le 9 mars 1944, (…), un jeune homme enfermé dans une cellule de la prison de Loos, écrit (…) à sa mère, veuve de guerre, une lettre bouleversante mais pleine de sérénité.
« A l’heure où vous recevez cette lettre je ne souffre déjà plus. Quand j’ai décidé, à l’âge de 13 ans, de m’engager dans les enfants de troupe, déjà je me sentais l’âme d’un soldat. Aujourd’hui, je suis à deux doigts de la mort et je n’ai même pas peur. J’accepte la volonté de Dieu avec courage : dans deux heures environ j’aurai rejoint le royaume de Dieu ; j’y retrouverai mon cher papa. Dis à tous que dans ce que j’ai fait, j’ai cru reconnaître là mon devoir, que je meurs avec la satisfaction du devoir accompli ».
Et, deux heures plus tard, Henri MARTRICE, enfant de troupe de l’école de Tulle, tombe sous les balles du peloton d’exécution.
Cette lettre admirable, ce témoignage de foi qui renferme tout : la vocation militaire affirmée dès le plus jeune âge, le sacrifice librement accepté, le courage (…), nombreux sont les enfants de troupe, et anciens enfants de troupe qui de 1940 à 1944 auraient pu l’écrire, si le temps leur en avait été laissé.
- La France est battue (…) ;
les écoles militaires préparatoires sont, pour la plupart, occupées par les Allemands et évacuées en zone provisoirement libre ; les enfants de troupe n’acceptent pas la défaite, la transformation de leurs écoles en établissements d’éducation (…) leur devient jour après jour plus insupportable.
L’esprit frondeur qui est une de leurs caractéristiques, se manifeste d’abord par des chants patriotiques (…), puis se transforme, non pas en haine, mais en intention farouchement hostile à l’ennemi (…). Et c’est ainsi que les plus valeureux d’entre eux vont se lancer dans l’aventure, dans l’épopée de la Résistance.
En commun, ils ont la foi et le patriotisme ; ils ont aussi la jeunesse, les élèves ont pour la plupart de 16 à 19 ans, certains sont vraiment des enfants : JUBEAU sera décoré de la Croix de guerre à 13 ans. Ils ont aussi une méconnaissance à peu près totale du métier des armes, leur qualification militaire se limitant aux exercices d’ordre serré ; et il leur faudra apprendre, très vite, le maniement des armes parachutées par les alliés (…) ; il leur faudra découvrir, lors de leur premier engagement, les règles élémentaires du dur combat de guérilla ; ils le feront avec toute leur fougue et le désir de servir, au mépris des pertes sévères qui leur seront infligées.
Ces adolescents, (…), vont trouver en face d’eux une armée allemande (…) redoutable : les moyens dont elle dispose – aviation, artillerie, blindés – font apparaître bien dérisoires les FM Bren, les mitraillettes Sten, les quelques bazookas ou autres grenades Gammon dont sont dotés les combattants de la Résistance. L’ennemi, sentant bien que la partie lui échappe, devient jour après jour plus implacable, méprisant fréquemment les lois de la guerre. (…) Il y a aussi la sinistre Gestapo (…), et (…), les miliciens, qui ont choisi délibérément de se ranger avec les Allemands. Peu importe, car comme le dit Jean LAILHACAR, enfant de troupe de Billom qui tombera non loin d’ici le 11 juin 1944 « C’est à nous, qui sommes du métier, d’y aller. » Du métier, ils en ont bien peu mais ils y vont. Ils y vont les 22 de Billom qui, ayant tout juste rejoint le maquis, vont se retrouver ici, au Mont Mouchet, (…) et à peine armés, sont immédiatement aux prises avec un ennemi infiniment supérieur en nombre, (…) qui les encercle, faisant des ravages dans les rangs de ces gamins dont les survivants iront continuer ailleurs leur combat et parfois, comme CHAUCHON, trouver, une semaine avant ses 17 ans, la mort qui n’avait pas voulu de lui ici. Ils y vont aussi, les 32 enfants de troupe de Tulle qui, de janvier à mars 1944, quittent clandestinement leur école (…) pour s’engager dans le maquis. Ils y vont les 56 enfants de troupe de l’école d’Autun, repliée au camp de Thol, qui écriront des pages d’histoire parmi les plus belles. Le 11 mai, ils offriront à leurs chefs, autour du drapeau de l’école qu’ils sont allés récupérer, une prise d’armes quelque peu irréaliste dans une clairière de l’Ain. Dans la nuit du 6 au 7 juin, guidés par des cheminots du dépôt d’Ambérieu, ils détruiront 52 locomotives (…) ; ils parachèvent leur mission par des actions répétées et audacieuses qui paralysent tout le trafic ferroviaire de la région. Ils y sont allés aussi, tous ces isolés, issus de toutes les écoles de métropole et d’outre-mer, dont l’histoire est moins connue, mais dont l’héroïsme est le même, qui ont rejoint le maquis de leur région, où ils ont tout naturellement et avec la même ardeur, participé à la libération de notre pays. Comment ne pas rappeler enfin, les enfants de troupe des écoles d’Indochine, et en particulier de Dalat qui résistèrent avec autant d’abnégation et de foi à l’ennemi japonais (…). S’ils y sont allés, beaucoup hélas ne sont pas revenus. Parmi les 22 de Billom, partis groupés, 10 sont morts au combat ou en déportation. À Tulle, la liste est longue de ceux qui sont tombés les armes à la main, de ceux qui ont été fusillés, pendus ou déportés, de ceux qui ont eu à subir les représailles de la division « Das Reich ». Sur les 56 enfants de troupe du camp d’Autun, la moitié seront mis hors de combat : 14 tués, 14 blessés. Parmi tous ces jeunes héros, comment ne pas évoquer quelques figures ; que les autres me pardonnent, ils ont tous droit à une égale reconnaissance et à un même respect, comme y ont droit les survivants qui, ayant d’avance accepté la mort, ont eu la chance d’en réchapper.
BOURET, lieutenant BRUN dans la Résistance, ancien de Rambouillet et de Tulle, tente dès le 19 juin 1940 de rejoindre l’Afrique du Nord ; ayant échoué, il crée à la fin de l’année 1941 un groupe de résistance et organise l’armée secrète de la Dombes. Puis, dans le maquis de l’Ain, il s’empare le 11 novembre 1943 de la petite cité d’Oyonnax où aura lieu le défilé fameux dont le retentissement en France et à l’étranger sera immense, car la tenue de ces maquisards, marchand derrière leur drapeau, montrera ce que sont véritablement ceux que l’on continue d’appeler terroristes. Un mois plus tard, le 16 décembre, BOURET est chargé de détruire les installations électriques des usines Schneider au Creusot. La mission, périlleuse, est accomplie mais BOURET, après avoir franchi deux barrages à la grenade, est capturé. Alors il se bat à coup de poings contre les Allemands et est abattu de deux balles de révolver ; il s’écroule en criant « Vive de Gaulle, Vive la France » ; il agonise toute la nuit et à chaque fois qu’il reprend ses esprits, il entonne la Marseillaise. Il meurt le lendemain. Il est fait Compagnon de la Libération.Compagnon de la Libération aussi RUIBET, d’Audinac, dont le décret de nomination résume bien l’héroïsme.
« Ayant appris que l’armée allemande venait d’entreposer aux carrières d’HEURTEBlSE, près de JONZAC, cent vingt trains de munitions, a réussi à s’y faire embaucher avant juin 1944. Pendant un mois, il s’est employé à mettre en place dans toute la carrière un dispositif de cordeaux et d’amorces. Le 30 juin, ayant fait éloigner ses camarades et sachant qu’il n’avait aucune chance d’en réchapper, il a fait sauter la carrière entière, trouvant, dans cette gigantesque explosion, une mort héroïque. »
GANGLOFF dit POPEYE, du camp d’Autun, se bat avec sa fougue habituelle à Neuville-sur-Ain le 11 juillet 1944. Grièvement blessé, il reste deux jours et deux nuits sur le terrain, se nourrissant d’herbe. Alors qu’il est retrouvé par les miliciens, il se donne plusieurs coups de canif dans la région du cœur ne voulant pas tomber vivant entre leurs mains ; il meurt le 14 juillet en chrétien et en héros, ayant refusé jusqu’au bout de donner même son nom.
C’est la même conduite que choisit MERCIER, lui aussi grièvement blessé et qui, au moment d’être pris, se tire une balle dans la tête.
Et puis il y a encore ce jeune LORENZI, 15 ans, de l’école des Pupilles de l’Air de Grenoble, qui meurt dans les combats pour la libération de Paris, et est décoré, à titre posthume, de la Médaille militaire et de la Croix de Guerre avec palme.
Combien d’autres pourraient être cités parmi ces enfants de troupe de la Résistance. Si seuls ceux qui étaient avec eux pourraient prétendre à une parcelle de leur gloire, nous avons, tous, le devoir de leur rendre hommage mais aussi le droit d’être f iers de leur conduite. Hommage leur a été rendu par la Nation qui a épinglé sur les drapeaux des écoles d’Autun et de Tulle la Médaille de la Résistance avec rosette. Aujourd’hui par nous Il l’est aussi, les anciens élèves des écoles militaires préparatoires, (…), devant cette stèle à leur mémoire ; à proximité du Monument national de la Résistance sur le territoire de la commune de Clavières, (…).
Ces enfants de troupe Résistants sont notre fierté, ils ont, comme leurs anciens et leurs jeunes, les milliers des nôtres tombés au champ d’honneur lors des deux conflits mondiaux, (…) en Indochine, en Algérie, au Tchad comme au Liban, en Afghanistan et au Mali, accompli, comme le disait Henri Martrice avec beaucoup de modestie, ce qu’ils croyaient être leur devoir.
Ils font partie de l’histoire des enfants de troupe, de votre histoire à vous, les jeunes des lycées militaires d’Autun et de Saint-Cyrl’École, de l’école militaire préparatoire technique de Bourges.
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